Depuis Kashgar,...
Kashgar, 6-05-07
(J’ai commencé ce message il y plusieurs semaines mais la technologie de l’information n’étant (heureusement) pas encore arrivée sur la région du Kunjerab Pass, je ne l’envoie que de Kashgar)
Démarrer l’écriture d’un nouveau message est toujours le plus difficile (le stress de la page blanche) mais aussi le moment le plus excitant. Ce voyage m’aura fait prendre conscience que je prends un réel plaisir à essayer de transmettre nos impressions, nos rencontres, nos galères. Malheureusement, tout le monde ne s’appelle pas Sylvain Tesson, Bernard Ollivier, Alexandre et Sonia Poussin ou autre écrivain voyageur…Généralement, dans les jours qui précèdent, je gribouille sur mon petit carnet qq. idées, histoire de soulager ma mémoire flanchante. Et puis quand la coupe commence à être bien remplie, je me lance…Le moment le plus propice est soit le matin tôt ou le soir tard, bref quand les enfants sont au lit, histoire d’avoir un peu de calme dans nos 6m2.
Bon je vous raconte tout cela car aujourd’hui, je suis vraiment sec pour attaquer mon message alors je vous bassine avec mes états d’âme, en guise d’intro…
Nous nous « arrachons » d’Islamabad, le lundi 9 avril dernier, pour nous lancer à l’assaut de cette fameuse Karakoram Highway (KKH) Arracher est vraiment le terme adéquat tellement, après ce long break si agréable à Islamabad, la perspective de retrouver les routes sinueuses et crevassées de la KKH nous pèse. Malgré notre excitation de découvrir (ou de retrouver pour moi) cette région extraordinaire et si accueillante où culminent 7 sommets à plus de 8000m d’altitude (dont le fameux K2), nous imaginons bien que cette traversée de la chaîne du Pamir ne va pas se faire sans qq. difficultés.
Nous prenons la décision de dernière minute de rejoindre la vallée de la Swat par la KKH et le col de Shangla (au lieu de la route ouest) Apres 8 heures de route, nous arrivons à la nuit tombée à Besham. Nous sommes à proximité de la zone du terrible tremblement de terre qui a frappé le Pakistan en 2005 et les traces du séisme sont encore très visibles. Les agents de la Croix Rouge Internationale que nous rencontrons nous confirment qu’ils prévoient une assistance jusqu’en 2011.
Sur la KKH avec le Naba Pargat derrière
Le lendemain, nous attaquons la route du col de Shangla et notre enthousiasme tourne vite court : la route est complètement défoncée. Nous parcourons 4/5 km et devant les souffrances de notre Obelix, nous devons nous résigner à faire demi-tour. La décision est dure à prendre car cela signifie que nous renonçons à visiter la Vallée de la Swat ou nous devions également retrouver Marcello. Mais la route est encore longue jusqu'à Breugny et nous devons préserver notre monture…En fait, c’est surtout le centre de gravité trop élevé d’Obelix qui le rend dangereux sur ce type de route montagneuse. Du coup, de retour à Besham, nous en profitons pour avancer sur le foutu CNED. Que voulez vous, il faut savoir tirer avantage de toute situation….
Direction donc Gilgit, à près de 300 km que nous parcourons en 11 heures. Apres Besham, la route devient plus accidentée et sinueuse. La végétation luxuriante des premiers plateaux laisse très vite place à un paysage plus minéral.
Sur la route de Skardu
La plaine de Skardu
Je garde un souvenir mitigé de cette petite ville que j’avais du fuir sous les balles lors d’un premier passage en 1988. « Some tensions », comme ils disent ici, entre sunnites et shiites avaient fait tout de même qq. 250 morts…Aujourd’hui, Gilgit a explosé au niveau urbanistique et le petit aéroport, par exemple qui était à l’époque à l’extérieur de la ville, se retrouve maintenant en plein centre…
A l’entrée de Gilgit, un hélicoptère trône au milieu d’un rond point, avec comme plaque descriptive : « Indien destroyed helicopter ». Bonjour l’ambiance !! L’armée est en effet omniprésente à Gilgit, d’abord pour des raisons de proximité avec la frontière indienne et ensuite depuis 2004 où les « tensions » entre les communautés sunnites et shiites se sont à nouveau ravivées.
Nous installons notre bivouac dans le jardin du PTDC, la chaîne d’hôtels gérée par le gouvernement Pakistanais. Un lieu très agréable, calme et spacieux. En plus, le temps est très doux avec une petite brise bien chaude le soir…Nous en profitons pour boucler les CNED de Camille et Baptiste !! C’est fini pour eux !!! Dommage que l’alcool soit interdit, on aurait arrosé cela. Par contre, suite aux retards du CNED dans l’édition des cours du 2eme semestre, le pauvre Thibaud reste tout seul à étudier ses cours : c’est plus facile à gérer pour les parents mais plus dur pour Thibaud de voir les autres jouer maintenant. Décidemment…..
Nous apprenons lors de notre arrivée à Gilgit que nous venons juste de manquer la finale d’un tournoi important de polo. Les enfants (et les parents aussi) sont très déçus d’avoir loupé un tel spectacle. On essaiera bien les jours suivants de suivre un match d’entraînement mais sans succès.
A Gilgit, je dois à nouveau passer qq. temps sur la mécanique : les nids de poule ont eu raison du radiateur qui doit à nouveau passer sur le billard. Lors d’une manipulation pour intervertir les pneus avant et arrière, je casse un écrou de jante. Bigre, c’est le type de pièce de rechange que je n’avais pas vraiment prévue. Pas de problème, nous sommes au Pakistan où tout est (presque) possible !! Sur la partie filetée restée intacte, mes nouveaux camarades bricoleurs réussissent à coups successifs de soudures, à rajouter une bonne épaisseur de métal, puis à usiner la pièce !! On y a bien passé 4 heures, mais on était tous très fiers de nous à la fin…
Après 3 jours de repos, nous reprenons la route pour Skardu, dans le Baltistan. Nous avons beaucoup hésité pour réaliser ce voyage aller-retour car la route de Skardu est réputée spectaculaire mais également dangereuse. Mais le Baltistan, c’est une région splendide ou sont concentrés les plus beaux sommets du Pakistan…
Huit heures de route non stop pour 171 km !! Et il faut avoir le cœur bien accroché. Mais quel spectacle !! Imaginez, au milieu d’une vallée incroyablement encaissée avec parfois des à pic de plus de 200m au dessus de l’Indus, une route taillée dans la roche…La plupart du temps, la route est tellement étroite qu’on ne peut se croiser.
Ca croise difficilement...
A chaque virage, il faut s’attendre à piler net pour éviter le véhicule venant en face. Les éboulements sont également assez fréquents et viennent obstruer la route...Les changements de rives se font à travers des étroits ponts suspendus en bois et qui ondulent au passage des véhicules (vitesse maxi obligatoire: 5km/h, un seul véhicule à la fois) On s’étonne soi-même lorsque, soudain, on passe la 3eme…Et en bas, l’Indus bouillonne de furie…
Sur la route de Skardu
Mais la récompense est grande, lorsque à 20 km de Skardu, on arrive sur cette immense plaine désertique, perchée à 2200m d’altitude et entourée de sommets enneigés. Skardu a tellement changé depuis mon précèdent passage que je ne la reconnais plus.
Sans avoir eu même le temps de trouver le PTDC local pour notre bivouac du soir, nous apercevons depuis la rue principale, un match de polo en pleine action. « Un polo de cheval !!» comme dit Valentine. Allez, oubliés les 8 heures de route !! Ni une, ni deux, nous garons Obelix et filons vers le terrain de polo. Les enfants sont surexcités, nous aussi !! Mais à peine arrivés sur place, coup de sifflet, tous les spectateurs se lèvent, les cavaliers descendent de selle….Ouf, il ne s’agit que de la mi-temps !! Arrivés à hauteur des tribunes d’honneur (bon, le seul endroit où il y a qq. chaises bancales !), des officiels Pakistanais nous aperçoivent et nous invitent aussitôt à nous asseoir au premier rang. Royal, les Duduch !! J’ai même le privilège de donner le coup d’envoi de la 2eme mi-temps en lançant la balle au centre. A la fin du match, je fais remarquer à Claire qu’elle est la seule femme dans tout le stade…
Les Duduch aux premières loges pour le match de Polo
Après une bonne journée de repos bien mérité, nous poussons notre curiosité jusqu’au village de Sadpara. En fait, nous avions pensé monter jusqu’à Kaplu, petit village situé à plus de 100 km de Skardu, mais la prudence et surtout la fatigue nous ont fait revoir à la baisse le programme des festivités. Nous arrivons à Sadpara en pleine fleuraison des abricotiers, les couleurs sont splendides. Le lendemain, petite présentation de notre voyage à l’école du village puis bonne balade à pied en famille jusqu’au plateau de Deosai, histoire de nous dégourdir les jambes. On touchera même la neige et on verra nos premiers yaks !!
Le village de Sadpara
Première neige à Sadpara
La route du retour est tout aussi impressionnante et ….épuisante. Nous arrivons à Gilgit à la nuit tombante, avec une nouvelle crevaison. Ouf, j’ai juste le temps de m’arrêter devant un réparateur de pneu qui prend immédiatement les choses en main. Cela fera un démontage de pneu en moins à me payer !!
Nous retrouvons Gilgit avec beaucoup de plaisir. L’accueil ici est chaleureux (il faut avouer que notre Obelix ne passe pas inaperçu et que les familles étrangères se baladant avec 4 enfants ne font pas légion !) Nous commençons à avoir nos petites habitudes chez les differents commerçants. Le marchant de Chapatis est un réfugié Afghan (il y en a beaucoup à Gilgit) et je crois comprendre que le père de famille est un ancien officier de l’armée de Commandant Massoud. Le cyber café ne ménage pas son énergie pour obtenir (avec succès) une connexion sur le réseau, à partir de mon Lap Top. Le gérant de la boutique téléphonique où je passe un coup de fil, m’offre un jus d’abricots frais délicieux. L’agent principal de la poste centrale m’invite dans son bureau pour envoyer les courriers du CNED. Et à chaque fois, le thé nous est offert. A tel point que cela en devient pour nous un réel problème digestif !!
Notre boulanger à Gilgit
Vendredi 20 avril, nous reprenons la KKH pour la Hunza Valley. Etonnamment, l’état de la route n’est pas génial pour un axe commercial aussi stratégique que celui-ci. Les éboulements sont très fréquents et je peine à passer une coulée de neige qui a fortement endommagée la chaussée. A nouveau, vive le 4x4 !! Très vite, nous entrons dans la zone des Ismaéliens et nous percevons immédiatement un comportement très différent de la population : les hommes sont plus souriants mais surtout, il y a enfin des femmes dans la rue !! et en plus, elles ne sont pas systématiquement voilées…
Sur la route d'Aliabad
Nous installons notre bivouac pour 2 jours au camping d’Aliabad, près de Karimabad, avec une vue extraordinaire sur le Rakapuchi, 7725m d’altitude. Nous avons toujours beaucoup de chance avec le temps et c’est un vrai bonheur de pouvoir ouvrir au petit matin, depuis notre lit, un coté de notre duplex et admirer le levé du soleil sur ce splendide sommet.
Coucher de soleil sur le Rakapoutchi
Premiers rayons sur le Rakapoutchi
Petit dèj devant le Rakapoutchi
Avant de reprendre la route en direction de la frontière, nous faisons un dernier plein de gaz pour notre fidèle bouteille que nous traînons depuis la France. A Islamabad, j’avais bricolé un adaptateur franco/pakistanais en faisant souder sur un écrou femelle français un écrou mal pakistanais. Le genre d’adaptateur pas vraiment homologué GDF mais bien utile dans ces contrées lointaines. J’espère ainsi que nous tiendrons jusqu’en Iran, où la recharge de gaz est facile.
Je profite également de notre arrêt à Aliabad pour faire un sérieux nettoyage du filtre à air. Depuis que nous avons pris de l’altitude, je sens la puissance du moteur sensiblement diminuer. J’espère que Obelix passera sans trop de problème le cap des 4800m du Kunjerab Pass. S’il le faut, je retirerai carrément le filtre à air.
Sur la route de Passu
A Passu, nous installons notre camp de base pour plusieurs jours au Shisper View Hôtel, le genre d’endroit où règne une ambiance qui nous rappelle celle du Silk Road Guest House de Yazd en Iran. Alors que nous n’avions rencontré quasiment aucun routard depuis Islamabad, nous retrouvons ici plusieurs d’entre eux, dont la plupart en attente comme nous de l’ouverture prochaine du Kunjerab Pass.
Le village de Passu
Vous imaginez les longues soirées à partager sur nos expériences de voyage…
Pour la petite anecdote, voyant dés le premier soir, le délicieux dîner cuisinier par Sultan, le fils du patron de la Guest House, nous décidons de nous payer un petit extra pour le lendemain soir, 19h30 précise. Le lendemain 19h, pas de Sultan. 19h15, 19h30, toujours rien….Devant la tête paniquée du patron, nous décidons de prendre les choses en main. Ferran, un cycliste d’Andorre, part aux cuisines et les enfants Duduch mettent la table et font le service. Le dîner sera excellent et très convivial avec visiblement une main un peu moins épicée que d’habitude...
Notre ami Ferran
Le lendemain de notre arrivée, une jeep s’arrête devant notre Guest House. C’est Bruno que nous avions rencontré qq jours auparavant à Karimabad, qui part faire une expédition en ski de randonnée. Et parmi les 4 français qui l’accompagnent, je retrouve Philippe Yvon, patron de la région Sud-est de Veolia Eau…Comme le monde (de Veolia) est petit !!!
Avec Philippe Yvon de Véolia
Depuis que nous avons pris la décision de passer par le Pakistan (au lieu du Népal) pour entrer en Chine, je rêve de retourner à Shimshal pour y retrouver un ami pakistanais que j’avais connu très brièvement lors de mon premier passage en 1988…
Petit retour dans le temps : Je fais connaissance en 88 avec Yusuf Khan alors que nous étions voisin de chambre dans un petit hôtel de Skardu. Apres de longs mois de service sur le terrain, Yusuf, à l’époque militaire de carrière, rentrait chez lui à Shimshal, petit village isolé du reste du monde, près de la frontière chinoise, à trois jours de marche de Passu. Yusuf m’invite à l’accompagner dans son village. Malheureusement, après une journée de marche, l’ami australien qui m’accompagnait alors se blesse au pied et nous devons abandonner notre projet d’atteindre Shimshal.
En 1996, un ami, guide dans les Pyrénées, organise une expédition sur Shimshal. Je me joins à eux en espérant pouvoir retrouver Yusuf. Malheureusement, celui-ci est à nouveau en service. J’apprends tout de même à cette occasion que mon Yusuf est un grand alpiniste, ayant participé à la 1ere expédition pakistanaise sur le K2…De cette deuxième tentative, je garde un souvenir fort de cette marche d’approche vers Shimshal, avec des sentiers perchés à flan de falaises et des traversées de rivière sur des tyroliennes…
Thibaud et Baptiste sur le pont suspendu de Passu
Baptiste sur le pond suspendu de Passu
Les Duduch au complet
A Passu, nous apprenons qu’une « jeep road » relie depuis 2004 Shimshal à la KKH. Pas question pourtant de prendre Obelix, la route est trop dangereuse. Ce sera donc la Jeep qui fait quotidiennement la navette, enfin quand l’état de la route le permet (les éboulements étant assez fréquents). Mes descriptions de Shimshal étant si convaincantes que les 5 autres étrangers du Shisper View Guest House décident de nous y accompagner. Du coup, les 6 Duduch, les 5 autres étrangers, plus les 7 locaux, cela fait 18 personnes (dans une jeep de 12 places !!), coincés comme des sardines, qui prennent la route en milieu d’après midi, pour 3 heures absolument extraordinaires. Oubliez ma description de la route Skardu/Gilgit : de la bibine par rapport à cette piste, accrochée par je ne sais quel miracle aux falaises vertigineuses.
Sur la route de Shimshal
Par moments, nous surplombons la rivière de plusieurs centaines de mètres. A deux reprises, nous devons descendre du véhicule pour déblayer la piste bloquée par des éboulis. Dans certains virages, la jeep a du mal à braquer, tellement la piste est étroite. Claire préfère fermer les yeux. Moi, je n’en mène pas tellement plus large. Thibaud, coincé au milieu des passagers, s’inquiète de ne pas pouvoir sortir à temps de la jeep si celle-ci venait à quitter la piste….Le silence est glacial chez les étrangers alors que nos amis pakistanais s’échangent les dernières nouvelles dans un brouhaha joyeux, comme si de rien était…
No comment...
Passage d'un pont suspendu
Vers 18 heures, éreintés, les jambes ankylosées, nous atteignons enfin Shimshal.
Premières lumières sur Shimshal
Cette fois-ci, les locaux me confirment que Yusuf est bien présent au village mais sa maison est à ½ heure de marche. La rencontre tant attendue sera donc pour demain. Pourtant, en plein dîner dans la toute récente Shimshal Guest House, on m’appelle à l’extérieur : c’est Yusuf qui est venu à ma rencontre, ayant été informé par le bouche à oreille de notre venue.
Quelle marque d’hospitalité !! Malgré les 19 années qui nous séparent depuis notre première rencontre, je reconnais immédiatement cette belle tête si fière et droite. Je rappelle à Yusuf notre rencontre de 88. Il se souvient (ou feint par politesse de se souvenir) de notre rencontre à Skardu et de la journée de marche vers Shimshal. L’accueil est chaleureux. Yusuf me propose immédiatement de venir loger chez lui, mais malgré son insistance, nous préférons ne pas nous imposer à 6. Nous convenons de dîner chez lui demain soir.
Le lendemain, nous partons à qq. uns faire une journée de marche vers le Shimshal Pass à plus de 4000m. Malheureusement, le temps n’est pas au beau et nous rentrons sous la pluie. Pendant cette journée, Dietmar, un ami allemand, Claire et les enfants sont restés se balader dans le village. A 3300m d’altitude, les arbres fruitiers sont en fleur et le spectacle est magnifique. Claire n’en revient pas de cet accueil de l’ensemble des villageois. Il faut dire que nous sommes les vraies vedettes ici, avec nos 4 enfants. Les Shimshalis n’avaient jamais vu cela !!
Cherchez l'erreur...
Vers 18h, nous prenons le chemin de la maison de Yusuf.
La maison de Yusuf
Tout le village est au courant du fameux dîner et les gens nous saluent tout le long du chemin qui nous mène chez Yusuf. Gol, le neveu de Yusuf, est venu nous chercher pour nous guider. Apres les présentations des 2 familles, Yusuf est fière de nous amener dans la « guest room ». Comme en Inde chez Léo sur la Yellagiri Hills, nous dînons seuls, tous les six devant Yusuf et Gol qui assure la traduction, les autres membres de la famille étant restés dans la maison. Nous apprenons que Yusuf a participé à 15 expéditions au dessus de 8000m, dont 3 jusqu’au sommet. Au court d’une expédition conjointe avec l’armée allemande, il a sympathisé avec un officier allemand qui est revenu à plusieurs reprises à Shimshal. Et événement important dans le village, le fils aîné de Yusuf vient de partir 5 mois en Allemagne pour y apprendre l’allemand. Peut être aurons l’occasion de le rencontrer à Paris lors de notre retour….
Les enfants chez Yusuf
Le lendemain, restés seuls à Shimshal, nous passons la journée à flâner dans le village. Le soir, nous sommes invités à dîner par la famille de Motazar. L’atmosphère y est encore plus traditionnelle que la vieille. Nous dînons toujours seuls mais cette fois, toute la famille est présente autour de nous. Quel tableau…
Pièce commune d'une maison de Shimshal
Nous sommes un peu inquiets concernant notre retour prévu pour le lendemain matin à 7h car la jeep qui devait arriver à 18h de Passu, n’est toujours pas arrivée. Heureusement, vers 23h, en quittant Motazar, nous apprenons que la jeep serait bien arrivée. Il est convenu que le cuisinier de la guest house ira dem
ain matin en se levant à 5h prévenir le chauffeur de passer nous prendre. Le lendemain matin, à 6h, je passe voir le cuisinier pour vérifier si tout est OK : il dort toujours….mais « no problem Mister »….Et de fait la jeep pointe enfin son nez vers 7h30. Le retour est nettement plus tranquille qu’à l’aller : nous ne sommes que 16 personnes au lieu de 18 dans la jeep…Qu’en au spectacle à l’extérieur de la jeep, il est toujours aussi grandiose.
De retour à Passu, et à force d’admirer ces montagnes autour de nous, nous commençons à avoir des fourmis dans les jambes. Nous décidons donc de laisser les 2 filles dans le camion et de partir tenter le 1er 4000m (4120m exactement) des 2 garçons. Ce fut dur, surtout pour nous les vieux !! Mais mes amis, quel spectacle au sommet, avec vue sur 3 glaciers majeurs !!!
Passu avec Obelix au point blanc en bas : pas dégueu la vue!
Les hommes lors de notre petite grimpette
Le glacier de Passu
Au retour, nous retrouvons avec plaisir la famille Bodineau et leur 2 enfants que nous connaissons depuis qq mois via le net et que nous avions croisée rapidement à Islamabad. Les enfants sont heureux de retrouver des copains. Les parents aussi !! et la journée du lendemain est passée à refaire le monde…
Lundi 30 avril, il nous faut quitter toute la troupe d’amis (pakistanais et étrangers) que nous avons à Passu. Au moment du départ, le propriétaire du seul petit bouiboui de Passu offre même des pierres aux enfants…
La frontière ouvre le 1er mai et nous avons rendez vous le même jour à Tashkurgan, en Chine, avec l’agence chinoise qui doit nous permettre de faire passer Obelix. La Chine est en effet le seul pays à ma connaissance oû l’importation temporaire de véhicules étrangers doit se faire via des agences agréées. En fait, une véritable escroquerie !! Le choix de notre agence sait fait sur un critère très simple : c’était la seule qui acceptait de ne pas nous imposer en permanence un guide. A 6 dans 6m², nous affichons déjà complet !! Tellement seule cette agence, qu’aucun autre overlander n’a entendu parler d’elle !! Le suspens restera donc entier jusqu’à la frontière chinoise. Pour info, pour les autres overlanders, cela nous a tout de même coûté la bagatelle de 700 euros !! (aux dernières nouvelles, les prix sont à la baisse et une récente transaction se serait faite la semaine dernière pour 350 euros)
Sur la route de Sost
Arrivés la veille au soir à Sost, poste frontière Pakistanais, nous nous présentons donc le matin du 1er mai avec des visas expirés depuis la veille. Profil bas les Duduch…En fait, nous constatons à notre dépend qu’il ne faut jamais traverser une frontière le 1er jour de sa réouverture…Quel bordel !!! A l’heure d’ouverture des bureaux, les douaniers étaient encore à Gilgit, à 3 heures de route !! Une fois sur place, il a fallu trouver une table, des chaises…On a re-ouvert le livre des registres, on a perdu encore 5mn pour trouver les bons tampons. Il a fallu tracer des colonnes sur une nouvelle page blanche….(pour l’anecdote, la famille Duchateau a fait l’ouverture de la campagne 2007 !!) Onze heures, nous avons RDV dans 4 heures à Tashkurgan et nous avons 5 heures de route…L’ambiance est chaude dans Obelix !!
Obelix met donc les bouchers doubles pour grimper les qq 1800m qui nous séparent du Kunjerab Pass. La route n’est pas en très bon état et il nous faut à plusieurs reprises éviter les éboulements sur la chaussée. Soudain, à mi parcours, je ne vois pas un dos d’âne et c’est le vol plané…la reception est terrible. J’immobilise Obelix pour une inspection : la cardan de transmission avant s’est déboîté. Aussitôt, tout le monde est sur le pont, la caisse à outil est sortie, j’enfile mes habits de bricolage, les enfants étalent les clés au sol…Le cardan est démonté en moins de 20mn. Les mains encore pleines de cambouis, nous reprenons la route vers le Kunjerab Pass. L’heure tourne et notre retard s’accentue.
Sur la route du Kunjerab Pass : tout le monde sur le pont
Au Kunjerab Pass, à 4800m d’altitude, nous faisons un petit break pour immortaliser ce moment tant rêvé. Le temps est beau, légèrement nuageux. Nous sommes seuls au milieu de cet immensité desolée. Qq yaks au loin, paissent dans des prairies bien maigres, encore partiellement recouvertes de neige. Obelix reprend son souffle. Contrairement à mes craintes, il a grimpé les dernières centaines de mètres comme un chef.
Au Kunjerab Pass à 4800 mètres
Un pied au Pakistan, un pied en Chine
Comme si les chinois voulaient souligner leur différence par rapport aux Pakistanais, la route, coté chinois, dés la ligne de partage des frontières, est un véritable boulevard !! 500m après le col, coté Chinois, le 1er check point. C’est l’occasion de vérifier si notre agence chinoise nous a dit vrai sur le nouvel emplacement du poste frontière, aujourd’hui basé à Tashkurgan, à plus de 135km du Kunjerab Pass. Tout de suite la rigueur et la discipline chinoise nous impressionne et nous fait même rire. Quel contraste avec le Pakistan que nous avons quitté le matin même !!! Les soldats ont l’air de véritables automates dans leurs gestes et déplacements. Apres une rapide inspection des passeports (05RE80872, 04RE54165, 05FE….), et des visas, nous filons (c’est vraiment le terme) vers Tashkurgan sur une route toujours nickel (Quel changement depuis 1988 ou j’avais alors empreinté ma premiere piste en tôle ondulée) Deux km plus loin, nous croisons un premier véhicule et nous évitons de peu l’accident : j’avais oublié qu’en Chine, il faut rouler à droite. Apres plus de 5 mois de conduite à gauche, ça fait tout drôle !!
De larges plaines arides s’ouvrent à nous tout au long de cette descente vers Tashkurgan. Obelix se paye qq pointes à plus de 100km/h. Malheureusement, il n’apprécie pas trop de s’être fait amputé d’un cardan et la direction a des tremblements qq. peu inquiétants. Encore des petits révisions en perspective pour Kashgar…
20h30, heure de Pékin (l’ensemble de la Chine fonctionne sous l’heure de Pékin), nous arrivons enfin au poste frontière de Tashkurgan avec plus de 2h30 de retard, en même temps que le bus assurant la ligne Sost-Tashkurgan. Un véritable escadron de douaniers nous accueille, mais pas de guide à l’horizon. Le premier contact est un peu « froid ». Nous devons remplir multes formulaires, passer devant une machine qui détecte automatiquement notre température, abandonner tous nos légumes frais,…..Toujours pas de nouvelle du guide….Ce qui frappe immédiatement, c’est la discipline chinoise : 2 douaniers enregistrent les passeports sur ordinateurs. Leur travail est supervisé par un autre douanier. Puis les passeports sont transmis à 2 autres douaniers qui vérifient le travail des premiers collègues.
Soudain, Thibaud me prévient qu’il vient d’entendre un chinois demander Mr Vincent. C’est notre guide qui vient à notre rencontre. Il était temps car un des douaniers vient de nous annoncer qu’il faut descendre toutes nos affaires personnelles du camion pour les faire passer dans la machine à rayons X. Autant faire directement passer Obelix dans la machine !! Apres lui avoir expliqué qu’il y en a peut être pour 2 à 3 heures, nous finissons par le convaincre de venir inspecter lui-meme l’intérieur du camion. Nous avions entendu qq. histoires d’inspection au peigne fin avec des DVD détruits et multes objets confisqués. Nous avions du coup pris qq précautions totalement inefficaces en cachant les DVD sous le lit des enfants, le téléphone satellitaire dans une cloison,….Finalement, l’inspection ne durera que qq secondes et après avoir payé le reliquat à notre guide, nous sortons de la douane, bien contents d’avoir enfin accomplis cette étape qui nous aura pris la tête depuis de longs mois.
Je passe rapidement sur Tashkurgan qui fait un peu ville du Far West avec ses horribles bâtiments et ses avenues rectilignes…
Le lendemain, nous reprenons la route pour le Lac de Karakol. Depuis Sost, nous faisons route avec Ferran, le cycliste d’Andorre en route pour le Tibet. Nous nous retrouvons avec plaisir à chaque étape et le croisons également souvent sur la route. A chaque retrouvailles, les enfants s’exclament : C’est Ferran !
Ferran, prêt à partir
A Karakol, j’avais souvenir d’un grand lac bleu argenté entouré de larges plaines verdoyantes au pied du Muztagh Ata (7546m) Un décor exceptionnel. Il faudra que je vérifie sur mes photos de l’époque mais les plaines verdoyantes ont aujourd’hui laissé place à une terre aride et sèche. La superficie du lac a également fortement diminué. Et pour boucler le tableau, des tourist resorts ont été construits le long du lac….La déception est forte. Histoire d’enfoncer le clou, nous tombons sur l’une des très rares semaines de vacances pour les chinois (semaine du 1er mai) Nous sommes très impressionnés par le nombre de 4X4 ultra modernes que nous croisons sur la route…
Obelix au pied du Muztagh Ata
Au pied du Muztagh Ata
Notre famille à Karakol
Après qq difficultés pour échapper à l’oppression des rabatteurs, nous trouvons un bivouac dans un petit village où une famille Kirghizi nous accueille dans sa maison. Ferran dormira avec la famille dans la pièce commune. Le lever du soleil au pied du Muztagh Ata sera splendide.
Premières lueurs sur le Muztagh Ata
Nous passons la matinée à tenter qq incursions sur des pistes à l’écart de la KKH mais nous sommes à chaque fois refouler par la population avec l’ordre de nous adresser à la police locale (enfin c’est ce qu’on arrive à comprendre...) Visiblement, des instructions ont été clairement données. Il faut dire que nous ne sommes qu’à 8/10km de la frontière avec le Tadjikistan.
Les Duduch au premier check-point chinois
Vers 13h, un peu désabusés, nous décidons de filer pour Kashgar. Une tempête de sable a du se lever sur le désert du Tamlatakan. Nous pouvons à peine distinguer le haut des parois rocheuses des gorges de Ghez. Quel dommage…
Nous entrons dans Kashgar en début de soirée….Kashgar, ville clé de la route de la soie, oasis au milieu du désert, Kashgar et son fabuleux marché du Dimanche…..
Mais il se fait tard ce soir et vos yeux fatiguent…Je vous raconterai donc notre rencontre avec cette ville dans notre prochain message avec Segogo ou Sarko comme nouveau Président. Vive la France !!
A bientôt